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24 octobre 2007 3 24 /10 /octobre /2007 15:07

Do you speak « chien » ?

 

Au Japon, on décrypte paraît-il depuis peu les aboiements des chiens ! En France aussi, on cherche à les décoder pour mieux connaître nos amis et cerner leur personnalité. Mais de leur côté, les toutous comprennent-ils réellement notre charabia et nos injonctions ? Voici deux ou trois clés pour une meilleure communication réciproque. A l’attention des humains only…

 

Par Anne-Caroline BRICE

 

L’invention révolutionnaire est directement venue du pays du Soleil Levant. C’est en effet au Japon qu’un vétérinaire astucieux -et un brin cupide peut être aussi- a récemment mis au point le « Bowlingual », petit appareil électronique équipé d’un microphone attaché au collier du chien qui transmet ses aboiements à un traducteur automatique. Celui-ci analyse les sons émis et propose une version en anglais de ce que le toutou a voulu exprimer. Avec l’aide de deux cents modèles d’émotions puisés dans une banque de données, le Bowlingual détermine si l’aboiement -et donc l’intéressé- est heureux, triste, frustré, en colère, quémandeur… Les traductions proposent des expressions comme « je veux jouer », « moi, pas content », « j’ai faim » ou « c’est fou comme on s’amuse »… La belle affaire !

Ce gadget qui a été salué par l’hebdomadaire américain Time comme étant l’une des innovations les plus originales de l’année 2002, est vendu dans le monde -mais pas encore dans l’Hexagone- pour l’équivalent de 90 euros. Malgré 30% de retour au fabriquant de jouets (Takara Co) pour insatisfaction de quelques clients, ce boîtier rigolo semble encore promis à un bel avenir. Les Américains en raffolent. Quant aux Français -ceux qui connaissent l’existence du petit bijou- se demandent quand le Bowlingual débarquera chez nous…

         « esbroufe », « gadget »,  « arnaque » : Laurence Bruder-Sergent* spécialiste du comportement canin,  n’a pas de mot assez dur pour qualifier ce boitier, censé livrer aux maîtres perdus la clé d’une bonne communication avec leur fidèle compagnon. « Car chaque an im al a son mode d’expression unique et sa façon singulière d’aboyer. Ainsi quand un Chiwawa a peur, il va plutôt produire un aboiement aigu, alors qu’un Terre Neuve craintif va émettre un son beaucoup plus grave. Question de morphologie de cage thoracique et cordes vocales. De plus, un an im al qui aboie peut expr im er deux choses opposées selon que sa queue remue (ou pas) et que ses oreilles sont dressées, pointées, plaquées (ou pas)… Et le boitier japonais ne tient pas compte de la posture du corps qui fait toute la différence. » Dont acte.

         Plus généralement, il semble d’abord que le chien n ’aboie pas uniquement pour dialoguer avec l’homme. En fait, il expr im e avant tout un désir brut (fa im , soif) ou une émotion (la joie, l’excitation, la peur, le plaisir, le dégoût) qu’il veut transmettre notamment au reste de l’espèce an im ale. Et si l’aboiement est bien le langage de notre compagnon, il ne correspond jamais à des mots précis. Il s’agit plutôt d’expr im er une intention. Inversement, rappelons aussi que nous humains ne nous accordons même pas sur les sons de base émis par nos chiens ! Dans la langue française, on traduit les vocalises de nos toutous par « ouaf, ouaf », « wouf, wouf » ou « wouah, wouah ». Alors que les Chinois préfèrent l’onomatopée « wung, wung » et les Espagnols adorent leur fameux « jau jau »…

Pour comprendre son toutou, il faut donc non seulement écouter son aboiement mais aussi examiner son attitude et évaluer le contexte dans lequel il s’exprime. Car le chien ne communique par seulement par des sons mais aussi et surtout par le regard qu’il offre, la posture qu’il adopte, l’énergie qu’il développe.

         En plus, il existe aussi des toutous qui ne sont pas naturellement avares d’aboiements : certaines races sont en effet les championnes des coups de gueule comme les terriers ou les jack-russel. Un peu assourdissants pour les voisins d’ailleurs. Alors que d’autres se révèlent plus discrètes comme le malamute, chien costaud et résistant d’Alaska, plus tranquille, plus pépère et… de nature moins expansive ! Question de tempérament bien sûr.

On sait également que les gros toutous aboient en général moins que les…petits que l’on surnomme facilement roquets. « De façon plus générale, on peut dire que plus le chien est gros, plus il est lourd, moins il est rapide, moins il aboie aussi», explique Laurence Bruder-Sergent, auteur du livre « La cause des chiens ». Au-delà de la question de la race, si un chien jappe sans répit (et certains résistent une journée entière !) c’est parce qu’il s’ennuie, qu’il y a un malaise ou parce que son maître lui manque! Il faut savoir aussi que l’aboiement intempestif est un comportement très juvénile. En effet, le toutou-ado de 8 mois va plus souvent vouloir tester les réactions de son entourage en donnant de la voix à tout bout de champs…

         Autre manifestation canine connue : le grognement. «Les gens voient généralement le grognement comme une menace et c’est souvent vrai, explique pour sa part Cheryl Smith** qui entraîne des chiens aux Etats-Unis pour des concours. Mais certains toutous grognent seulement pour s’exprimer. Et il est ici aussi important de « lire » le chien dans son entier! »

         Côté homme, on a vu comment on pouvait mieux comprendre notre an im al. Mais côté chien, comment notre compagnon à poil nous perçoit-il ? La question mérite d’être posée car nombre de propriétaires jurent que leur toutou comprend tout. La réponse est cruelle, sans équivoque et définitive : « les maîtres se trompent… », réplique Laurence Bruder-Sergent qui met les points sur les I. Le chien ne comprend pas un seul mot de notre langage! Ni le français, ni l’anglais, ni le chinois… Il n’a pas cette capacité-là, n’en déplaise à tous les maîtres orgueilleux. En revanche, et la bonne nouvelle est de taille, notre toutou est formidablement observateur : il peut enregistrer et reconnaître le ton de notre voix ainsi que la gestuelle liée aux mots que nous employons. Ainsi en observant sans arrêt son maître, le chien va finir par associer un événement précis à une sonorité spécifique. Explication : il va s’asseoir à force d’entendre « Assis ! » mais ne bougera pas d’un iota si vous lui dites un beau matin « Poses tes fesses à terre ! ». Question de conditionnement.

Autre signe troublant : sachez que votre chien se fiche éperdument de son propre nom. « Au cours de sa vie, essayez par exemple de le changer. Je vous assure qu’il vous répondra alors de la même manière, renchérit la spécialiste du comportement canin. L’important est l’intonation que l’on prend pour dire ce nom. Je connais l’exemple d’un chien surnommé dans un premier temps « Crapule » qui a été rebaptisé « Lulu » et qui n’y a vu que du feu… »

Dorénavant, notre résolution est prise : plus question d’abreuver nos fidèles compagnons de nos interminables mots de sympathie ou d’agacement. Cessons tout s im plement de leur susurrer des « je t’a im e mon toutou » puisqu’ils n’y comprennent goutte ! « Non, bien au contraire, poursuit Laurence Bruder-Sergent, il faut continuer car lorsqu’on dit notre amour à notre chien, on n’est pas en colère, on dégage de l’affection et les mots expr im és sont le plus souvent accompagnés d’une caresse réconfortante ». Ah, la caresse, quelle douceur, quel sésame ! Et si finalement c’étaient eux qui avaient tout bien intégré spontanément ? A savoir qu’en amour, les mots étaient décidément moins im portants que les actes !

Si le chien ne comprend jamais un mot précis, il peut en revanche retenir et intégrer des ordres donnés de façon répétitive. Car son intelligence est réelle. Ici encore, les chiens sont inégaux. Par exemple, le labrador, le golden retriever ou le berger allemand sont tout à fait capables d’emmagasiner près de 50 ordres différents dans leur cerveau. Le caniche quant à lui, n’en retiendra qu’une trentaine et le cocker, une vingtaine au maximum. Quant au dogue allemand, on dit seulement de lui que c’est un élève appliqué, gentil, gentil. Mais qu’il peut toujours mieux faire…

 

* auteur de « La cause des chiens » (site internet officiel : www.comportement-canin.com)

** auteur de «Parlez-vous chien ? » (Ed. Le jour). En librairie le 15 nov. Prix : 22,40 euros.

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